Le tribunal correctionnel de Marseille a également condamné l’imam Ismail, Smaïn Bendjilali de son vrai nom, à 2.000 euros d’amende, cinq ans d’interdiction des droits civiques et l’inscription au Fichier des auteurs d’infractions terroristes (Fijait).
Les juges ont ainsi suivi les réquisitions du parquet, à l’exception d’une demande de bannissement du réseau X pour six mois et d’une interdiction définitive d’exercer en tant que salarié au sein de la mosquée des Bleuets.
Il a été reconnu coupable pour avoir republié en juillet 2024 sur son compte, suivi par plus de 11.000 personnes, une vidéo accompagnée d’un commentaire qualifiant de « légitime défense » l’attaque sanglante du mouvement palestinien Hamas qui a fait plus de 1.200 morts côté israélien le 7 octobre 2023.
Il a par contre été relaxé pour une seconde publication, dans laquelle il a reposté une vidéo accusant des soldats israéliens de torture sur un Palestinien, y ajoutant ce commentaire : « Daech à côté, ce sont des enfants de chœur ».
Après ce jugement, l’imam a annoncé à la presse qu’il entendait reprendre « avec fierté » ses activités d’imam dès le prêche de ce vendredi.
« Relayer ce n’est pas y adhérer et je n’adhérais pas à ces propos là », a-t-il répété, comme lors de l’audience fin mars. « Forcément, dès qu’on défend les Palestiniens, on est antisémite ou terroriste », a-t-il accusé, tout en assurant que « ça ne nous fera pas taire ».
Une mosquée dans le viseur de l’Intérieur
Son avocat, Me Sefen Guez Guez, qui n’a pas exclu de faire appel, a salué une « relaxe partielle » et « un désaveu suite aux réquisitions du procureur de la République qui avait demandé l’interdiction définitive d’exercer la fonction d’imamat ». Il a mis en avant les « connexions entre une volonté du ministère de l’Intérieur de faire fermer cette mosquée et cette condamnation de M. Bendjilali ».
La mosquée et son imam avaient en effet été au centre d’un bras de fer administratif à la fin de l’été, le préfet de police des Bouches-du-Rhône ayant menacé de fermer la mosquée des Bleuets, située dans les quartiers nord, à la demande de l’ancien ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, justement en raison de ses propos et publications en ligne.
La procédure avait finalement été suspendue, suite au retrait « temporaire » de l’imam, le temps de passer un diplôme universitaire sur la laïcité, et la suppression de ses tweets.
L’imam Ismail et la mosquée des Bleuets sont cités dans le rapport sur les Frères musulmans commandé par le gouvernement, et rendu public la semaine dernière par le ministère de l’Intérieur.
L’imam, de nationalité française, y est décrit « de sensibilité plutôt salafiste mais usant des codes du frérisme ». « Il jouit d’une grande popularité auprès des jeunes musulmans en raison notamment de sa maîtrise des réseaux sociaux », et « au fil des années, la mosquée des Bleuets et ses associations satellites sont devenues très influentes dans le quartier », selon le rapport.
Interrogé par l’AFP, l’imam a dénoncé « l’incompétence du gouvernement qui ne sait pas dans quelle case nous mettre, salafisme, maintenant frérisme, alors que ce sont des trajectoires opposées… »
« J’ai appris aussi que je faisais de l’entrisme à travers mes actions sociales, de charité… Maintenant, même lorsqu’on veut faire le bien, c’est considéré comme de l’entrisme », a-t-il ironisé.
« Ils nous mettent des cibles dans le dos », a-t-il encore affirmé, estimant que « ce rapport jette la suspicion sur les musulmans » et que « le gouvernement actuel prend une trajectoire qui est vraiment inquiétante pour l’avenir ».